Justin KANKWENDA MBAYA: QUESTIONNER L’ACTION DE L’ÉGLISE CATHOLIQUE DANS L’ARENE POLITIQUE EN RDC

Les congolais sont de plus en plus habitués à voir l’Église catholique jouer un rôle dans la dynamique politique de la RDC. La CENCO prend des positions politiques. Certains de ses membres exercent même des mandats politiques fussent-ils de courte durée.

Les acteurs politiques les sollicitent et les religieux jouent volontiers le rôle politique que les politiciens veulent les voir jouer, quand bien même cela peut ne pas les engager dans leurs actions.

Dernièrement, des acteurs politiques qui se disent « groupe des treize » comme les treize députés qui avaient écrit la fameuse lettre de 52 pages en 1980 au président Mobutu, ont commencé la promotion de leurs idées. Ils ont fait le tour non pas seulement des acteurs politiques, mais aussi de certaines confessions religieuses. Ils sont allés voir en particulier l’Archevêque de Kinshasa dont le rôle politique n’est plus à démontrer. Les treize savent qu’il veut être l’ayatollah politique ou du  moins un des ayatollahs politiques qui font les rois en RDC.

Ces actes et pratiques se déroulent sous nos yeux, avec souvent notre consentement tacite ou démissionnaire. Je me pose des questions sur cet état de choses. Qu’elle soit invitée ou, comme c’est de plus en plus le cas, elle s’invite elle-même dans l’arène politique du Congo, quels sont les rôle et place de l’Église catholique, et c’est quoi son combat politique dans cette arène ?

Dans cet article, je partage mon analyse et mes réflexions à ce sujet, non pas seulement en tant qu’analyste ou citoyen, mais aussi en tant que chrétien catholique.

  1. L’Église catholique au Congo : survol historique

La conquête, l’occupation et l’exploitation coloniales au Congo depuis l’époque léopoldienne ont été réalisées à travers un trio d’instruments institutionnels partenaires qui conjuguaient leurs actions de manière harmonieuse, comme composantes d’un même dispositif colonial, en vue d’obtenir les résultats escomptés. Ce trio qui régna sur la RDC pendant presque quatre-vingts ans était composé de l’État colonial (le Bulamatari ou casseur de pierres, c’est-à-dire de toute résistance), les trusts et ou compagnies à charte sur le plan économique, et de l’Église catholique sur le plan de la culture et de la spiritualité. Il s’agissait d’un véritable « triumvirat colonial », quand bien même l’État en était le premier d’entre les membres.

Membre et noble princier dans le « triumvirat colonial », l’Église catholique avait la mission et la charge de la colonisation mentale, de l’imposition de la culture voulue par l’entreprise coloniale, de la conversion spirituelle du colonisé, de la destruction de ses références cosmogoniques et du changement de ses valeurs civilisationnelles, bref, de la domestication mentale.

Tout un dispositif de colonisation mentale fut mis en place, et très activement à travers l’évangélisation, la création du système éducatif religieux et non religieux, les œuvres sociales, etc. Un corps expéditionnaire important et croissant fut mis à contribution à travers les missions catholiques avec leurs armées de prêtres, frères, sœurs, personnes consacrées et volontaires de toute sorte.

L’Église catholique en avait le monopôle, et bénéficiait de l’appui des autres membres du « triumvirat colonial » qui lui facilitaient la disponibilité des terres, les infrastructures, religieuses, éducatives, médicales ou sociales. De ce fait elle dominait l’univers mental et culturel des colonisés. Elle était devenue elle-même un référentiel.

Grâce à ce monopôle, le troisième prince régnant se mit à détruire parfois avec violence toute autre culture, spiritualité, valeurs et toute autre symbolique des colonisés. Tout cela était diabolisé et prêché comme tel. On alla jusqu’à inculquer dans la tête du congolais que porter un nom chrétien était une valeur et même une sorte de promotion sociale dans le système de valeur du colonisateur. Elle accumula une richesse artistique énorme, un patrimoine culturel et ses référentiels symboliques et civilisationnels, pourtant déclarés sataniques, et qui font aujourd’hui la grandeur du Musée royal d’Afrique Centrale à Tervuren.

Avec ce monopôle, toute autre religion était combattue et notamment l’entrée du protestantisme, qui par ailleurs venait des pays occidentaux autres que la Belgique. L’Église catholique appris à ses ouailles de chanter que « le premier protestant avait volé le livre du Pape (catholique) ». Les autres Églises étaient donc diabolisées, et l’Église catholique avait mené une lutte contre leur implantation. C’est pourquoi entre autres raisons, une des manifestations des luttes contre la colonisation s’exprima notamment sur le terrain religieux et spirituel, en particulier avec l’apparition des religions comme le kitawala, le kimbanguisme, etc.

L’arrivée de l’indépendance a peu secoué le troisième prince du triumvirat, du moins dans ses premières années. Il restait encore bien confortablement dans ses bottes princières, et assis sur son fauteuil princier. Mais les paramètres institutionnels du triumvirat avaient changé. Le monopole sur les terrains culturel, spirituel, éducatif, médical et social était secoué par l’ouverture de ces différents terrains aux autres acteurs et prédicateurs. Mais le prince n’y était pas bien préparé, il continua ses pratiques habituelles de ses fonctions dans le triumvirat qui, même s’il existait encore, ne pouvait plus être colonial.

  1. L’Église catholique dans la gouvernance postindépendance

En réalité l’indépendance avait plus ou moins sonné la fin du triumvirat. Le troisième prince (l’Église catholique) ne jouissait plus des prérogatives et faveurs coloniales. Il se trouvait devant une nouvelle situation, dans laquelle il devait se repenser et se redéfinir, y compris par rapport au nouveau dispositif politique, économique et social, bien qu’encore imbu des séquelles de ses origines coloniales. Il fallait progressivement s’adapter à la nouvelle situation et se positionner à cet effet.

Un des efforts importants fut mené sur le plan religieux et même théologique au cours des deux premières décennies de l’indépendance. Sans véritable engagement dans ce qui s’appelait à l’époque la théologie de libération ailleurs, avec la participation au combat du peuple congolais pour la liberté et l’indépendance, il y eu plutôt des penseurs qui ont tenté de fonder des courants ou mouvements religieux ou théologiques africanistes. Monseigneur Malula lui-même avait toujours eu son penchant pour cette voie d’expression africaine de la vie chrétienne. Les noms des théologiens comme Mulago, Tshibangu, Ntedika, Tshamalenga, Bimwenyi, etc., sont parmi les grands noms qui se sont mis à la recherche d’un renouveau spirituel et évangélique sous le leadership du catholicisme. Le renouveau a semblé sombrer plus dans le symbolisme liturgique que dans d’autres domaines. Une sorte de courant « négrologue » se pavanait à démontrer à l’intention d’on ne sait qui, que les religions africaines connaissaient aussi Dieu le père, et à dédiaboliser certaines pratiques condamnées par le catholicisme colonial.

L’Église avait aussi des problèmes d’organisation interne à affronter et résoudre correctement. Les difficultés de gestion interne, des conflits de leadership et parfois ethnoculturels ne manquaient pas. Les missions coloniales d’évangélisation furent rebaptisées en paroisses catholiques avec une nouvelle carte administrative au niveau national. Une structure organisationnelle fut mise en place et s’appelle aujourd’hui CENCO, qui travaille notamment à travers son Comité permanent, ses assemblées plénières, et surtout ses Commissions. Les diocèses et les paroisses sont organisés aussi avec des groupes thématiques.

La CENCO a permis notamment de renforcer l’unité de l’Église catholique au Congo, harmonisant les vues, positions et approches sur des questions importantes de la vie religieuse et de l’implantation sociale de l’Église. Elle a aussi aidé à régler certains problèmes pratiques de missiologie et d’évangélisation. Elle a en outre fait un effort pour montrer qu’elle était l’Église au milieu du village, attentive aux problèmes aussi bien de la vie spirituelle que de la vie sociale des chrétiens catholiques, ou simplement de la communauté humaine de Dieu au Congo, et faisant leur avocat.

Au-delà de ces problèmes et de ceux de survie matérielle de son armée (religieuse), l’Église catholique a eu à affronter, et continuer d’affronter des problèmes de taille d’un autre ordre. L’après monopole religieux, scolaire etc. est une période de son existence qui affiche des difficultés de maintien de sa place dans un terrain largement ouvert aux autres, en commençant par la gestion de la vie spirituelle elle-même dans le chef des communautés chrétiennes. La perte du terrain spirituel et religieux est évidente.

Les nombreux baptisés catholiques ne sont plus tous catholiques aujourd’hui, et ce n’est pas étonnant. La prolifération des Églises nouvelles ou du Réveil, et même une partie des ouailles de l’Église musulmane sont des anciens baptisés catholiques. Et cela est connu. Comment ces « fuyards », à l’image de la pratique très courante de la scissiparité dans les domaines politique et musical  congolais, arrivent à drainer des foules, y compris et même le plus souvent parmi ses ouailles des familles catholiques, avec un discours différent, pourtant fondé sur les mêmes livres ?

Car sur son propre terrain, considéré comme conquis et acquis pour l’Église catholique, de nouvelles religions avec de nouvelles armées de prophètes et leurs différents gradés spirituels ont su s’incruster, développer un autre mode de religiosité et de spiritualité, qui a su captiver et répondre à la faim et à la soif du peuple congolais de Dieu. J’insiste : cette conquête sur le terrain du catholicisme ne s’est pas faite qu’envers des non convertis chrétiens, mais c’est même avant tout sur des franges non négligeables des baptisés catholiques.

Quel est ce nouveau discours, quelle est cette nouvelle approche à la vie religieuse et spirituelle des popualtions qui, visiblement restaient assoiffées, et étaient à la recherche d’une autre réponse à leurs angoisses existentielles, auxquelles le catholicisme n’avait pas pu trouver réponse ? C’est sur ce terrain que l’Église doit développer son autocritique et sa conception d’une autre approche, d’un autre mode de « semer » la bonne parole. Sans doute que la question est depuis longtemps à l’ordre du jour des commissions compétentes de la CENCO. Mais le résultat n’y est toujours pas. En tout cas pas de manière évidente. Si l’Église catholique n’a pas correctement repensé son action et ses pratiques dans ce domaine, pour inventer une nouvelle manière de « semer » la bonne parole, alors, elle a un problème de fond qui va continuer à la miner.

Il y a lieu de questionner la capacité de plus en plus douteuse et donc l’efficacité de l’action de l’Église catholique de se réinventer et d’innover, forgeant un nouveau discours évangélique et religieux, qui réponde aux aspirations du peuple chrétien de Dieu au Congo, et à sa soif d’une autre vie spirituelle. Il y a eu certes une sorte de renouveau liturgique, donc essentiellement cosmétique comme changement, sans remettre en cause quoi que ce soit de fondamental pour être effectivement au milieu du village. Le problème de la contextualisation de l’Église universelle ne semble pas adéquatement résolu.

Comme elle ne peut plus se refaire sa place et son rôle d’origine dans un triumvirat inexistant, l’Église catholique s’est tournée vers d’autres domaines qui la rapprochent des peuples congolais de Dieu : les œuvres sociales et la politique. Au niveau des œuvres sociales, elle a mis en place une structure appelée Caritas Congo asbl, structure par laquelle elle est devenue l’agence d’exécution de l’État congolais, notamment pour des sections importantes dans l’éducation, la santé, les infrastructures de proximité, etc. Elle collecte aussi des fonds extérieurs à cet effet. Les conventions avec l’État et la rémunération de ses services rendus lui permettent aussi de contribuer au financement de ses propres activités, y compris de sa survie matérielle.

Incapable de trouver des réponses adéquates aux angoisses existentielles et spirituelles d’une frange de plus en plus grande de ses ouailles, l’Église catholique a fait un glissement sur le terrain  politique. Ce fut d’abord pour répondre à certaines sollicitations politiques, collectives et individuelles ; ensuite pour s’afficher comme avocat des populations congolaises de Dieu, et se recréer une sorte de virginité ou neutralité politique et de communion avec « sa base » ; et enfin pour faire la dérive de se mettre au milieu du village politique comme acteur.

  1. L’Église catholique dans le Congo postindépendance

Dans l’introduction du livre de l’ICREDES sur « Le degré zéro de la dynamique politique en RDC. De 1960 à 2018 », j’avais écrit ceci à propos du rôle des Églises dans la dynamique politique au Congo. « Lorsqu’on parle des pères de l’indépendance du Congo, on cite habituellement et avec fierté les noms des politiciens des années cinquante et soixante du siècle dernier. Ce qui est correct, mais pas complet, et ne fait pas justice à l’histoire politique du pays. Il est connu en effet, qu’un certain Abbé Joseph Albert Malula, curé d’une paroisse catholique à Léopoldville et plus tard Évêque auxiliaire dans cette ville, était activement impliqué dans le processus de lutte pour l’indépendance, en particulier derrière le groupe dit de « Conscience africaine ». C’est dire que c’est depuis longtemps que l’Église catholique ou du moins certains de ses acteurs sont impliqués dans l’histoire politique de ce pays.

Les Églises sont des segments actifs importants de la société civile en RDC. Leur poids moral, leur influence et capacité de mobilisation spirituelle, humaine et sociale, la force de leur message doublée de sa connotation pastorale évangélique et de son engagement dans la foi, tout cela fait que les églises ont joué et continuent à jouer un rôle non négligeable d’acteur non politique dans cette dynamique.

Censées s’occuper principalement des problèmes d’ordre spirituel, les Églises qui doivent être « au milieu du village » ne pouvaient pas ne pas avoir à se préoccuper aussi du bien-être social et de la vie sur terre de leurs croyants dans « le village ». Certaines comme l’Église catholique par exemple, ont développé à cet égard, leur propre doctrine sociale.

En dehors du culte musulman encore jeune en importance et non en historicité, il y a eu principalement les Églises chrétiennes, qui ont cherché à jouer ce rôle au milieu du village. De ce fait et selon que les périodes historiques étaient des moments calmes ou de turbulence politique, elles se sont trouvées au centre des sollicitations politiques ouvertes ou sournoises. Dans ce cadre, on peut distinguer quatre principaux courants des Églises chrétiennes : les catholiques, les protestants, les kimbanguistes et celles dites de réveil.

Il y a d’abord l’Église catholique. En Belgique, l’ex-métropole, l’institution la plus solide et la plus stable est l’Église catholique. Le Congo a hérité de certains traits de cette tradition religieuse. L’Église catholique au Congo est une véritable force à différents points de vue. D’abord au niveau physique et géographique. Elle compte quarante-sept archidiocèses et diocèses et des milliers de paroisses éparpillés à travers le pays, faisant un maillage tentaculaire du territoire avec un réseau actif. Ensuite au niveau spirituel et démographique, elle est forte de près de 37 millions de chrétiens, soit plus de 40 % de la population congolaise. Il faut dire que ce chiffre est à reconsidérer vu la poussée vertigineuse des nouvelles Églises qui ont recruté leurs ouailles y compris dans la bergerie catholique.

Au niveau social l’Église catholique est présente partout dans le pays, avec l’étendue et la diversité de ses œuvres sociales (éducation, santé) et de développement. Enfin du point de vue de la constance et du sérieux de son message : la CENCO, son organe dirigeant, est restée constante dans ses préoccupations sociales pour les chrétiens et pour tous les congolais, mettant ainsi en œuvre la doctrine sociale de l’Église. Cette dernière est restée au milieu du village congolais, assumant remarquablement bien sa mission, et maintenant toujours sa force religieuse de mobilisation. Ce qui en a fait une force avec laquelle on doit compter y compris politiquement, et c’est pourquoi elle a fait l’objet de beaucoup de sollicitations de la part des pouvoirs politiques.

De ce fait, directement et indirectement l’Église catholique a joué un rôle important dans la dynamique politique et sociale du pays. Elle l’a fait lorsqu’à plusieurs reprises elle a été sollicitée à cet effet comme lors de la CNS, et plus récemment pour présider la Commission électorale, dans la direction et la présidence des négociations ou dialogues politiques, etc. Elle l’a fait aussi indirectement car certaines de ses prises de position et ses messages ont contribué à freiner parfois certains excès du pouvoir. Malgré les sollicitations pernicieuses dont certains de ses prélats ont été l’objet pour les diviser, l’Église catholique est restée constante à travers l’action de la CENCO, allant jusqu’à s’opposer parfois ouvertement au pouvoir politique sur certaines de ces questions. Ce qui lui a donné des ailes, et elle a cru qu’elle devenait ou pouvait devenir ouvertement un acteur politique, notamment dans la fabrication des rois au Congo.

Face à ce poids de l’Église catholique, le pouvoir a cherché historiquement à attirer les autres Églises chrétiennes dans son sillage, les instrumentalisant à souhait. Les dirigeants de ces trois autres courants d’Églises chrétiennes, protestants, kimbanguistes et Églises de réveil sont ainsi traditionnellement acquis à la cause du pouvoir, se déviant d’une certaine manière, d’assumer leur rôle au milieu du village congolais, et fermant les yeux sur la situation de misère de leurs ouailles. Leur clientélisation politique est considérée comme un acquis pour les différents régimes autocratiques qui se sont succédé à la tête du pays, et elles ont bénéficié des largesses de ces derniers.

Dans certains cas, il ne s’est pas agi seulement des sollicitations du pouvoir à leur égard, il y a eu aussi de leurs propres démarches, y compris de certains prélats catholiques, en direction de ces régimes pour obtenir quelques avantages matériels, financiers et autres. Ceux parmi les dirigeants de ces Églises qui ont prêché ou tenu un discours laissant penser à une critique ou une contestation des pratiques du pouvoir, ont été amenés à expérimenter l’autre face de l’autocratie ».

  1. La complicité antipatriotique avec l’Occident

Parmi les acteurs et même « faiseurs » de la dynamique politique en RDC, il y a sans aucun doute les forces extérieures, qui ont eu à « fabriquer » leurs acteurs et tout l’environnement qui leur est favorable. La dynamique politique et le manque de progrès politique en RDC sont très marqués par le jeu des forces extérieures, vu la faiblesse des forces intérieures, très instrumentalisées, moyennant la distribution de quelques dividendes du système mis en place.

Le conflit entre l’Occident et la kabilie n’était pas dû au fait que le régime était vomi par le peuple congolais, qui d’ailleurs ne pèse pas dans l’équation congolaise de l’Occident, pas non plus pour le caractère dynastique et dictatorial ou le manque de démocratie du régime. Ce n’est pas non plus pour la « vérité des urnes », car on a vu le comportement de l’Occident durant et après les élections de 2006 et 2011. Voir Le Phare du 18 janvier 2019.

La cabale anti Kabila, était menée dans une action conjuguée par certains cartels financiers et surtout miniers qui le connaissent très bien, l’ont fabriqué et maintenu au pouvoir directement et à travers l’appui de leurs gouvernements nationaux.

Mais comme en plus il y avait une montée forte des forces politiques intérieures et du peuple congolais contre le régime, ce qui risque de conduire à un « dérapage » non contrôlé par l’Occident, ce dernier se trouve là une occasion pour s’insérer dans ce mouvement et l’utiliser pour éjecter Kabila de son siège de gendarme des intérêts occidentaux. L’appui au processus électoral, à certaines forces politiques et à certains segments de la société civile est crucial pour opérer le changement voulu. Il faut donc s’appuyer sur ces forces et les accompagner. C’est un jeu démocratique normal. Et comme il s’agit d’appui à un processus de démocratisation, personne ne peut et ne va douter de la bonne foi de l’Occident.

Mais il y avait un problème stratégique et politique important à résoudre : À qui confier la gouvernance formelle du Congo après le départ de Kabila ?

C’est dans ce cadre que l’Occident s’est mis à la préparation du terrain. Une série de réunions guidées en coulisse et surtout financées par lui ont terminé leur course à la réunion de Genève en novembre 2018. Il fallait fabriquer et/ou décider du leadership postélectoral en RDC, quitte à le faire endosser par une sorte de consensus politique de l’opposition. Et l’Occident savait jouer sur certaines cordes sensibles pour ses robots politiques en RDC, y compris la corde ethnoculturelle. Tout le monde connaît la suite.

Comme le choix de l’Occident, Lamuka, avait adopté la stratégie de ne pas aller aux élections, il ne s’y était donc pas préparé. Il n’avait pas eu le temps de recruter des témoins et des observateurs, de les former, de les envoyer sur le terrain, et de suivre leur travail. Il lui était ainsi difficile d’avoir des preuves de quoi que ce soit de fiable, sauf à travers un partenariat avec une autre institution ou organisation.

Au départ, l’Occident avait cherché à pallier ce déficit capital en entrant dans le processus électoral lui-même, notamment par le biais de l’aide financière et l’envoi des observateurs pour avoir une porte d’entrée officielle dans le processus électoral organisé par la kabilie. Malheureusement pour lui, le régime de Kabila qui avait ses calculs pour organiser une fraude électorale en vue de donner « démocratiquement » une victoire et un troisième mandat à Kabila, hors du regard des forces occidentales amies devenues ennemies, avait refusé toute aide financière, et en plus, le régime ne voulait pas du tout des observateurs étrangers non africains, donc occidentaux.

L’Occident trouva tout de même une porte d’entrée à travers son appui à l’organe dirigeant de l’Église catholique : la CENCO. Cette dernière est une force qui jouit d’une notoriété et d’une autorité morale indiscutables comme leader d’opinion dans la société civile congolaise. Il accorda ainsi un financement important et multiforme à la CENCO, pour l’observation des élections. L’objectif restait le même : veiller à ce que si elles doivent avoir lieu, les élections se passent conformément aux buts visés par l’Occident pour doter la RDC d’un nouveau leadership, mais acquis aux intérêts de l’Occident, et non un leadership qui opposerait les intérêts occidentaux à ceux du peuple congolais. Ceci peut ne pas avoir été dit de manière explicite, mais en sollicitant et/ou recevant le financement de l’Occident, la CENCO savait qu’elle avait à rendre compte à son financier.

On connaît les faits, y compris les révélations de Olivier Kamitatu, porte-parole de Moise Soriano Katumbi et membre du directoire de la campagne électorale du candidat de Lamuka, sur l’envoi de quarante mille téléphones cellulaires intelligents et quelques milliers de téléphones mobiles satellitaires. Le chiffre de téléphones envoyés par l’Occident par le biais de Lamuka correspondait curieusement au nombre d’observateurs équipés de téléphones par la CENCO. Ces téléphones (Occident-Lamuka) étaient donc destinés au réseau d’observateurs électoraux de la CENCO. Son équipement technique fait donc partie du dispositif occidental dans le contrôle du processus électoral en RDC, en vue d’en influencer les résultats dans son intérêt. Et la CENCO a accepté ainsi de jouer ce rôle d’agent d’exécution de l’Occident, jusqu’à faire des témoignages mensongers et sans preuves, en faveur de la fabrication occidentale du leadership en RDC.

Comme les résultats des élections n’étaient pas ceux machinés par la coalition antipatriotique Occident-Lamuka-CENCO, l’Occident mena une très forte campagne, très médiatisée dans l’opinion nationale et internationale, auprès des instances africaines et onusiennes, pour diaboliser lesdits résultats et les rejeter. Le vainqueur des élections était malheureusement celui qu’ils avaient combattu et éliminé du processus électoral. La CENCO participa très activement à cette campagne, se croyant forte de sa notoriété et de sa crédibilité. À l’ONU, l’occident et son bras opérationnel local CENCO furent déçus notamment par la position de certains membres du Conseil de sécurité qui ont traité la CENCO d’ONG qui ne peut être source d’information pour fonder une décision du Conseil.

Par ailleurs, la multiplication des aboiements finalement contreproductifs, dont la précipitation française pour une tentative d’utilisation des instances de l’ONU pour légitimer la position occidentale (réunion du Conseil de Sécurité), les déclarations pro-Lamuka des gouvernements occidentaux (belge et français en particulier), le recours bruyant à une base d’information (CENCO) de sous-main et douteuse, tout cela commençait à agacer une partie de l’opinion africaine et internationale.

Ainsi, bien financée par l’Occident, la CENCO se croyait être un acteur dans la fabrication de leadership au Congo. Elle était le premier à provoquer la turbulence postélectorale par son annonce trois jours après le scrutin, qu’elle connaissait la conclusion des résultats de l’élection présidentielle, sur base d’un faible pourcentage des bureaux de vote, à travers son réseau de téléphones mobiles. Mais elle était incapable d’en fournir les PV signés, qui pouvaient confirmer ses chiffres des résultats qui lui faisaient dire qu’elle connaissait le vainqueur et gagnant des élections  présidentielles.

Et comme pour montrer ce qui la préoccupait le plus, conformément à la mission que lui avait confiée son bailleur de fonds, la CENCO est restée quasi muette sur les résultats des législatives et des provinciales. Elle n’a plus annoncé qu’elle avait les noms des élus de ces deux niveaux. Par ailleurs et qu’on le veuille ou non, elle est en partie à la base des tueries sur fond ethnique ou ethnoculturelle qui s’en sont suivies ici et là. En tant qu’institution, sa crédibilité politique et morale devant le peuple congolais en a été affectée.

  1. La dérive politique de l’Église catholique en RDC

Avec ces péripéties et face à l’échec de sa stratégie prooccidentale, l’Église catholique, du  moins certains membres influents du Comité permanent de la CENCO, ont amorcé des pratiques de fuite en avant politique. La CENCO se sent à la fois des ambitions et une nouvelle une vocation : celle de l’ayatollahisme politique au Congo. L’Eglise catholique à travers la CENCO, se pose comme faiseur de rois en RDC, ou au moins comme agent des faiseurs extérieurs des rois dans ce pays. Elle se fait acteur et juge de la gouvernance des affaires de la cité. Et cette situation est encore plus affichée avec l’avènement de l’actuel Archevêque métropolitain de Kinshasa, par ailleurs vice-président de la CENCO.

J’ai toujours apprécié les sorties de nos pasteurs – discours, déclarations, communiqués, prédications et prises de positions sociopolitiques et spirituelles -, lorsqu’ils montrent qu’ils s’occupent ou se préoccupent du bien-être terrestre de leurs ouailles. Il m’est déjà arrivé de les féliciter et les encourager par lettre officielle (voir ci-dessous). Je parle de nos pasteurs toutes chapelles confondues, qu’il s’agisse de ceux qui croient nous endormir ou de ceux qui prétendent nous réveiller. Mais je ne suis pas certain que cela soit le cas dans la situation qui nous préoccupe dans cet article.

La dérive politique est évidente. Je me permets d’illustrer cela par quelques actes posés au cours des huit derniers mois seulement. D’abord le voyage du Cardinal dans le Nord-Kivu à l’occasion des fêtes de fin d’année, suivant de très près celui des leaders de Lamuka dans la même région. En janvier dernier (Le Phare du 10 janvier 2020), j’avais écrit : « Ce voyage des leaders de Lamuka dans la région Beni-Butembo est suivi à quelques jours d’intervalle par celui du Cardinal Ambongo, en tant qu’Archevêque de Kinshasa, vice-président de la CENCO, et/ou Primat de l’Église Catholique si ce titre existe en RDC et s’il l’est effectivement. Il vient aussi apporter ses consolations politiques et spirituelles sans doute, à ces populations meurtries.

Il fait la « même nouvelle découverte » que le tandem Lamuka : le plan diabolique de balkanisation de la RDC en commençant par le Kivu dont les auteurs sont les pays voisins de l’est, avec le Rwanda au premier plan. Il préconise une solution : attirer l’attention des autorités (qui ne semblent pas en être conscientes), et les inviter avec une certaine autorité, à prendre des actions vigilantes pour parer à cette tentative diabolique à laquelle le peuple congolais dans son ensemble, et les populations du Kivu particulièrement s’opposent.

Les deux déclarations Lamuka et Ambongo sont faites dans la région concernée, donnant ainsi un autre tonus politique que la prétendue consolation de fin d’année aux populations qui s’souffraient depuis longtemps des infiltrations étrangères, et s’étaient déjà révoltées avec raison contre la présence des troupes de la MONUSCO qui leur semblait inutile si pas nocive.

« Dis-moi qui te fréquente ou qui t’appuie et je  te dirai qui tu es ». Ce n’est pas mon adage, je le reprends de la sagesse populaire. Outre leur communion dans la découverte apparemment récente du plan de balkanisation de la RDC, en commençant par l’est du pays dont le Nord-Kivu en particulier, ces déclarations (Lamuka et Ambongo) communient aussi par leurs propositions de solution : prendre les armes pour aller en guerre ou prendre les armes pour se défendre et défendre l’intégrité territoriale en cas d’attaque. Que le discours soit ouvert ou voilé, la communion d’idées et de solutions est là ».

Dans le même ordre d’idées, il faut rappeler une autre communion dans les fréquentations : c’est la visite conjuguée et suivie de l’Abbé Nshole, Secrétaire général de la CENCO, et de Mwilanya à Kamhere en prison, à un jour près. Qui ne peut y voir la main de l’Archevêque de Kinshasa derrière ? Il y a eu des commentaires de toutes sortes à propos de cette coïncidence, et surtout de la signification et de la protée politiques de cette visite sélective. Bien sûr que l’Évangile apprend à rendre visite aux malades et aux prisonniers…

L’autre acte posé témoigne d’une attitude qui sème le doute dans les consciences citoyennes. En effet, lorsque le Président de la République lui offre un véhicule flambant neuf au stade des martyrs, l’Archevêques est content, et exhibe les clefs de la voiture au peuple de Dieu qui remplissait les gradins du stade. Il prend le peuple congolais à témoin pour dire que l’autre Président avait promis et déclaré, mais ne lui a jamais offert le véhicule promis. Le sens réel de la prise de témoin populaire était en réalité une demande insistante au Président Kabila et au FCC, pour qu’ils accomplissent leur promesse. Joseph Kabila avait compris ladite demande. Quelques jours après, l’Archevêque a reçu une autre nouvelle voiture, cadeau du FCC, remise par M. Mwilanya…. Donc il mange des mains aussi bien du Président Tshisekedi que de la kabilie. Mon Église catholique mangerait-elle à toutes les sauces ? À quel jeu politique joue-t-elle ?

Les tractations entre Églises pour la désignation du Président de la CENI et les révélations sur le déroulement réel des discussions ont dévoilé au peuple congolais l’attitude et les positions politiques de l’Archevêque de Kinshasa : tribalisme, discrimination ethnoculturelle, partisanisme politique, ambition d’Ayatollah politique, et faiseur de rois dans la politique congolaise. Pour justifier que l’Église catholique doit être écoutée, il est allé jusqu’à prétendre que les catholiques et les protestants représentent à eux seuls 80% de la population congolaise ! Quelles statistiques et quelles sources fiables : la liste des baptisés disponible à la CENCO ? Et combien de milliers d’entre eux se sont depuis convertis aux autres confessions religieuses ?

Ainsi la CENCO directement ou à travers le Cardinal, se débat politiquement pour le placement de certains acteurs, pour le dialogue politique, pour la réforme de la CENI et la nomination du président de la CENI. Elle offre le Centre interdiocésain pour abriter le fameux forum de consensus sur la réforme électorale initié par la Belgique à travers des acteurs de l’Université de Liège pour refaire Genève 2018…. Car elle communie avec l’Occident dans ce projet néocolonial d’une réforme électorale machinée par les puissances extérieures comme règle de jeu politique, que l’on vient faire endosser par les acteurs congolais sous le toit de la CENCO, et avec sa « bénédiction ».

La dérive politique du leader religieux est allée encore loin avec sa sortie remarquée par une autre porte : le sermon du 30 juin dans la Cathédrale Notre Dame du Congo à Lingwala. L’Archevêque de Kinshasa voulait sans doute faire autant ou mieux que le pasteur Ekofo dans l’Église protestante du centenaire. Son homélie a consisté à montrer que les soixante ans d’indépendance sont un échec collectif, mais qu’il fait porter plutôt sur les épaules des dirigeants, et il n’a pas tort. Mais il est allé loin pour alimenter l’idée de la fragilité et de l’illégitimité des institutions en place, de la nécessité de nouveau dialogue, etc. La raison en est que le Président en fonction n’est pas légalement élu. Lui et sa coalition au pouvoir ont triché et fraudé aux élections, volant ainsi la « bénédiction d’Esaü ». La coalition au pouvoir doit disparaître… Ce qui est la position de départ du prélat, et qu’il avait fait savoir pour embarquer la CENCO dans la campagne occidentale de janvier 2019. Il a même appelé les chrétiens catholiques et tout le peuple congolais, à se mettre debout et être prêts pour engager des actions contre le pouvoir en place au moment voulu, car rien de bon ne peut sortir d’un pouvoir de coalition entaché du péché originel du vol de la bénédiction d’Esaü. On n’est pas loin d’une fatwa prononcée par un ayatollah.

L’Église catholique au Congo garde silence devant ces dérapages politiques intentionnels. Se taire devant ces dérives c’est en être complice. Et comme le Pasteur Martin Luther King Jr disait, le silence des bons préoccupe les ouailles catholiques et le peuple congolais de bonne volonté, plus que les déclaration incendiaires et tonitruantes des mauvais. Certes, il y a eu un groupe de prêtres diocésains de Kinshasa qui ont manqué l’occasion de se  taire. Ils ont signé une déclaration pour soutenir leur archevêque dans les dires de son homélie… On dirait un témoignage de zèle commandité. Il y a des griots et des tambourinaires du roi partout, même dans l’Église.

Seul un groupe de chefs de confessions religieuses non catholiques a fait une déclaration collective pour s’opposer aux propos de l’Archevêque de Kinshasa. Ils ont contesté la prétendue supériorité de l’Église catholique, et affirmé qu’ils « s’inquiètent sérieusement du retour des Évangiles de Croisade et de la montée du Discours de la haine du haut de la chaire de vérité, pourtant destinée à proclamer en toute humilité l’Amour, la Paix, la Justice, la Tolérance, le Pardon, la Réconciliation et la Fraternité sans parti pris, pour se conformer à la vocation d’Église au milieu du village ».

Ce genre de dérives politiques de ceux qui ambitionnent de devenir ou même d’être déjà des ayatollah politiques faiseurs de rois au Congo, ne peut que renforcer le discrédit ou la perte des plumes de l’Église catholique, et l’éclabousse sérieusement, surtout quand elle se fait complice de ces dérives.

Que l’on ne m’accuse pas d’anticléricalisme à l’endroit de l’Église catholique. Loin de moi pareille position. Je m’insurge non contre l’Archevêque de Kinshasa ou tout autre prélat de la CENCO, mais contre leurs dérives politiques qui sont en plus partisanes. À cette occasion et pour le prouver, j’ai décidé de rendre publique, la lettre que j’avais envoyée à tous les membres de la CENCO, il y a plus de sept ans pour les féliciter et les encourager dans leurs actions spirituelles et sociales. Voir ci-dessous.

S-T. le 25 août 2020.

LETTRE A LA CENCO

Sorel-Tracy, le 19 juillet 2013

 Éminence le Cardinal,

Excellence Monseigneur le Président de la CENCO,

Excellences les Archevêques et Évêques membres de la CENCO

c/o Prof. Abbé Léonard Santedi, Secrétaire Général de la CENCO, Centre interdiocésain, Kinshasa Gombe

 

Objet : Remerciements et félicitations

Au nom du Christ Notre Seigneur, je vous salue avec respect en tant que corps de pasteurs dont notre pays a besoin, particulièrement par ces temps de crise sociétale : de l’État, de la gouvernance, de la morale, de leadership et de développement. Je me fais l’honneur de vous adresser cette lettre pour trois raisons majeures :

  1. Vous témoigner notre reconnaissance et vous exprimer nos remerciements

Depuis l’indépendance de notre pays, et à travers ses différents organes qui ont précédé comme suivi son existence en tant qu’institution, la CENCO a toujours été aux côtés du peuple de Dieu du Congo. A travers ses cinquante Assemblées Générales comme à travers les réunions de ses différents Comités Permanents, la CENCO a su mettre le point sur les i, et même mettre le doigt là où cela fait mal, c’est-à-dire là où il y a la maladie et la douleur dans la société.

Vous avez pu avec lucidité dépasser certaines divergences humaines bien compréhensibles, pour construire un consensus sur l’essentiel. Vous avez ainsi appréhendé correctement les enjeux et les donnes historiques de l’évolution de la RDC. Sur des problèmes cruciaux de la vie de la Nation, vous avez indiqué la voie de sortie de l’impasse, vous avez proposé des solutions aussi objectivement que le Seigneur vous en a donné la lumière. Vous avez donné des messages clairs et pris des positions justes et éclairantes, assumant ainsi vos tâches et responsabilités en bon pasteurs du peuple de Dieu du Congo.

Cela mérite notre reconnaissance en tant que chrétiens certes, mais surtout en tant que citoyens congolais méritant de dignes et valeureux dirigeants spirituels, totalement conscients des impératifs et exigences d’une vie humaine et décente à laquelle les congolais aspirent légitimement, et ont droit sur la terre de leurs ancêtres. Ils ont en effet reçu du Seigneur une terre où coulent le lait et le miel, mais dont ils ne jouissent guère. Et vous vous êtes mis à leurs côtés pour les appuyer et les guider dans cette appropriation sociale du lait et du miel de leur terre, et dans leur encadrement spirituel.

Merci Éminence, merci Excellences. Et même si je n’ai pas d’autorité pour parler au nom de notre peuple, je sais que je reflète là, ses sentiments les plus profonds que je partage pleinement à cet égard.

  1. Vous féliciter et vous encourager

Éminence,

Excellences,

L’Église Catholique au Congo ne peut être une Église en dehors de la société congolaise, ni au-dessus de cette dernière. Elle est pleinement dans cette société et en fait partie. C’est pourquoi la CENCO, consciente de cette position et de ses implications en termes de responsabilité pastorale, a su faire privilégier l’essentiel et le prioritaire pour l’intérêt et la vie de la Nation, pour la paix, et pour le progrès et le bien-être de notre peuple. C’est en cela et dans ces conditions que la parole de l’Évangile est audible, recevable et engageante pour le peuple de Dieu du Congo.

Sur cette base, la CENCO a su définir clairement et envoyer des messages porteurs aux dirigeants et responsables politiques, aux chrétiens, aux hommes et femmes de bonne volonté, pour les éclairer dans leurs analyses, les inviter à prendre leurs responsabilités, à agir dans le sens de l’intérêt du pays et du peuple, et leur proposer des voies parfois audacieuses de solution aux problèmes sociétaux, compte tenu des enjeux et des défis historiques de l’heure considérée.

Au-delà des messages et des invitations, la CENCO a eu à prendre des positions fermes et justes, et ce, avec un courage digne et à la hauteur des responsabilités collectives et individuelles de ses membres devant la Nation et devant notre peuple. Ce faisant, la CENCO a témoigné et continue de témoigner et de poser devant l’Histoire.

Je voudrais ici saluer votre action et votre courage, même quand il s’est agi des questions politiquement sensibles, car vous avez estimé que ce sont là des problèmes de l’existence et du devenir de la patrie, et donc du peuple de Dieu du Congo dont vous êtes des dignes pasteurs.

Il est arrivé sans doute que la réponse, la répercussion ou l’effet attendu de vos messages ne soit pas toujours à la hauteur des attentes de l’appel. Cela peut s’expliquer par un certain nombre de facteurs. Mais cela n’enlève en rien l’appréciation intime de vos prises de positions et de vos messages par le peuple de Dieu du Congo et par les hommes et femmes de bonne volonté. Enfin cela n’enlève en rien la pertinence de vos messages et prises de position. C’est pourquoi j’ai parlé de « témoigner et poser devant l’Histoire ». En cela la CENCO mérite nos encouragements, afin qu’elle ne se décourage pas, mais qu’au contraire, elle continue hardiment son travail, et sa mission dans notre pays. 

  1. Vous inviter au regard optimiste vers l’avenir

Éminence,

Excellences,

Je suis parfaitement conscient que j’enfonce là une porte ouverte ou que je prêche aux convertis. En effet, vous avez avec lucidité, fait des appels engageants à la vigilance devant certains dangers pour la nation congolaise et son peuple ; vous avez aussi eu à manifester vos inquiétudes devant le jeu politique ou autre des décideurs internes et externes, mais jamais vous n’avez exprimé une opinion pessimiste sur l’avenir de notre pays. C’est même cette force de conviction qui vous a toujours animés dans vos prises de position et vos messages aux acteurs de tous les niveaux.

Lorsque la CENCO fait des communiqués, envoie des messages et prend des positions, elle est comme le fermier qui sème. Ce dernier ne reste pas passif à l’attente de la germination, il la prépare, entretien le champ, scrute l’horizon pour la pluviométrie, enlève les mauvaises herbes qui étouffent la bonne graine afin que la semence porte ses fruits, et attend enfin de compte la moisson qui était l’objectif ultime de son travail. Et cette moisson n’est pas loin.

Il est ainsi impératif de toujours garder en nous l’espoir de la bonne récolte du travail de la CENCO, et de la lumière du Saint l’Esprit pour le devenir rayonnant de notre patrie.

Avec mes salutations respectueuses.

Prof. Justin Kankwenda Mbaya.

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